CAIRPs Transversales

CA du 29 novembre 2013 : Budget 2014 de l'EPIC

image_02Dans la lignée des années précédentes, 2013 voit l’entreprise RATP afficher un chiffre d’affaires, des résultats, des ratios d’endettement, des indicateurs de référence comme le ROCE en progression, signes d’une entreprise publique performante dans la durée. Le résultat pérenne (+ 12%) bien supérieur aux prévisions ainsi que la Capacité d’Auto Financement pérenne (+5 %) atteignent année après année des records historiques permettant d’assurer un niveau d’investissement, exceptionnel lui aussi, tout en permettant d’entamer le processus de réduction de la dette, hors indemnité du STIF.
Il faut également noter que le chiffre d’affaires des filiales, porté par RATP Dev progresse fortement même si les ambitions affichées au budget de cette filiale ne sont pas atteintes. Les foyers de perte semblent résorbés et la rentabilité enfin au rendez vous. Les résultats sont aussi là même si il faut tempérer ce satisfecit par le fait qu’ils sont pour partie dus à des reports d’acquisitions importantes.
Peu d’entreprises peuvent, dans le domaine des transports et le contexte que l’on connaît, afficher des résultats comme ceux de la RATP. Tout naturellement, pour l’actionnaire ou l’administrateur lambda, externe à l’entreprise, les comptes arrêtés par la RATP sont bons, même très bons, pour ne pas dire exceptionnels compte tenu du contexte économique. Il ne peut qu’approuver cette politique ou l’ingénierie et l’expertise économique et financière développées permettraient à l’entreprise, si elle était cotée, d’avoir les faveurs du marché.
Tout naturellement aussi, au-delà de l’aspect purement comptable et financier, dans une entreprise comme la RATP qui inscrit la responsabilité sociale au fronton de ses valeurs, dans une entreprise qui affiche dans ses gènes et son code éthique, l’humain comme une pierre angulaire et une valeur fondamentale de la réussite, l’administrateur salarié, a une grille d’analyse et de lecture plus étendue qui intègre des critères sociaux et salariaux en mesurant l’interaction entre la politique menée pour atteindre ces bons résultats et ses conséquences sur les salariés.
Nous n’allons pas vous livrer aujourd’hui une analyse avec beaucoup de nouveautés puisque les actions soutenant cette politique, même si elles ont tendance ces deux dernières années à s’accentuer et donc à aggraver la situation, sont récurrentes depuis maintenant 2009, véritable changement de cap pour notre entreprise. Pour accentuer le niveau du résultat et de la CAF, la masse salariale et les effectifs sont devenus ainsi la principale variable d’ajustement des comptes.
Cette politique a entraîné en 2013 la destruction de 796 postes, quand on compare les effectifs de sortie 2012 et 2013 en rajoutant les 743 créations dues à l’augmentation de l’offre décidée par le STIF qui s’est donc faite en réalité à effectifs constants. C’est aussi 246 postes supprimés en plus des prévisions budgétaires qui étaient arrêtées à un niveau élevé de 550 suppressions de postes
Cette tension permanente sur les effectifs accentue les problématiques de présentéisme et d’adéquation de l’offre, montre ses limites en terme de qualité de service et nous met encore plus que par le passé en incapacité, notamment à l’exploitation et plus particulièrement au département BUS, d’assurer aujourd’hui le service de référence sans pénalités. A BUS 1/3 des lignes sont pénalisées pour des causes internes et les critères, tels que prévus au contrat, sont amenés à se durcir.
L’entreprise affiche ainsi une productivité record, jamais atteinte par le passé, de 3,7% (ou 2.6 % en fonction de vos réflexions saisonnières) permettant certes d’afficher un coût à la VK en diminution de 1,8% mais avec toutes les conséquences sur la qualité de vie au travail que l’on peut imaginer.
Sur l’aspect rémunérations, L’évolution de la MSPA 2013 de 1,3% est la plus faible jamais enregistrée depuis qu’un contrat lie l’entreprise à la région ou au STIF. Alors que l’entreprise affiche d’excellents résultats, certainement les meilleurs de la profession et que la productivité exigée par le STIF a été très largement dépassée (+160%), La valeur du point n’a progressé que de 0,5% en niveau et 0,26 en masse. Pour compléter sur le chapitre frais de personnel et pour justifier cette modération salariale, vous mettez en avant une évolution du Revenu Moyen du Personnel (RMPP) en Place de 2,8% largement supérieure à l’inflation.
Or la RMPP comme la MSPA ne sont que des moyennes, elles masquent en fait de grandes différences et disparités dans l’évolution des rémunérations du personnel. Cette référence masque les inégalités et accentue le sentiment d’injustice.
la MSPA reste pour nous le seul élément objectif de comparaison avec les entreprises de transport, il est d’autant plus légitime que cet indice est pris en compte pour 70% dans l’indice de réévaluation du contrat STIF. Avec une évolution de 1,8% en 2013, il se situe 0,5% au dessus de la MSPA de la RATP.
Pour contourner ce qui peut paraître comme une comparaison embarrassante, certains ici ne veulent faire référence qu’à la RMPP et ne cessent année après année de nous culpabiliser sur son niveau. Nous nous sommes donc livrés à une analyse comparative issue de données publiques largement vérifiables, une partie de ces chiffres étant issue du rapport annuel de l’état sur la fonction publique, ce qui explique aussi ces références un peu anciennes.
Sur les années 2010, 2011 la RMPP fonction publique s’est élevé à 6,4% contre 6,1 % pour la RATP. Dans le même temps EDF et la SNCF attribuaient respectivement, 8,4 % et 7,8 % à leurs personnels.
Prenons comme autre comparaison le Salaire Moyen Par Tête (SMPT) que l’on ne nous communique pas à la RATP mais que certains connaissent parfaitement car il est remis par l’entreprise à la commission interministérielle d’audit des salaires du secteur public.
Si l’on le réfère donc à la MSPA RATP, et bien que celle-ci soit en moyenne d’après nos estimation d’environ 0,3% supérieure au SMPT, le SMPT de la fonction publique et entreprises publiques s’élève pour ces mêmes années 2010 et 2011 à 5,1% contre une MSPA à 4% pour la RATP.
Si l’on en reste aux entreprises publiques ou parapubliques de taille importante, sur la période 2010-2013, on note une RMPP avoisinant les 16,2% pour EDF et 15,7% pour la SNCF contre seulement 13% pour la RATP. Ces chiffres connus de nos tutelles sont éloquents et démontrent sans aucune ambiguïté que les salariés de la RATP sont loin d’être les privilégiés que l’on veut nous faire croire.
Bien au contraire, malgré les excellents résultats enregistrés année après année, ils sont ceux dont le pouvoir d’achat a le moins progressé alors qu’au contraire ils auraient du être récompensés pour leur implication et leur professionnalisme.
La question salariale est donc un sujet sensible en ce début d’année 2014, par ailleurs année qui va voir s’organiser 2 élections importantes pour la représentativité syndicale. Certes des négociations ont eu lieu sur les salaires mais elles ne sont pas satisfaisantes, ni sur la forme, ni sur le fond.
Sur la forme, alors que au regard des résultats, un signe fort était attendu, l’entreprise a cru bon de proposer, s’appuyant sur le budget cadré par nos tutelles et voté par notre CA, tout d’abord 0,16 % en masse pour l’année 2013 avant de revenir, après interruption de séance, avec 0,5 % d’augmentation au 1er juillet pour solde de tout compte.
Sur le fond, parce que ces propositions non négociables restent bien en deçà des revendications exprimées par les organisations syndicales qui exigent un juste et légitime retour pour les salariés, réflexion partagée par la mission de contrôle lors de son rapport sur le budget 2014.
Les Négociations Annuelles Obligatoires sur les salaires se concluent depuis cinq ans par des mesures unilatérales instaurant de fait une austérité salariale injustifiée au regard des résultats. L’entreprise, sous contrainte de l’état, ne peut contractualiser sur ce chapitre pourtant primordial pour la cohésion de l’entreprise.
Dans l’entreprise publique RATP, le progrès social porté par les administrateurs salariés et les organisations syndicales profite aussi bien à l’entreprise qu’à ses salariés dans une logique gagnant gagnant. Cette approche progressiste apporte beaucoup à l’entreprise et à ses voyageurs mais elle doit aussi générer des avancées sociales pour le personnel.
Sur commande des tutelles, La RATP semble pourtant tourner le dos à cette logique, ces orientations et ce modèle économique imposés laissant peu de place à la valorisation de notre modèle social. On ne peut pas sans cesse affirmer que la force de l’entreprise c’est son capital humain et ne pas le valoriser au travers d’une politique salariale satisfaisante. Je l’ai déjà dit : dire qu’on aime l’entreprise ne suffit pas, il faut aussi des preuves d’amour.
Il nous parait donc indispensable de renouer avec une politique salariale contractuelle, qui même si nous l’apprécions différemment au travers des organisations syndicales qui nous soutiennent, a fait ses preuves au niveau de la paix sociale.
Les administrateurs salariés utilisent ici leur droit d’alerte, il y a un vrai risque de dérapage social. Les pouvoirs publics doivent laisser des marges de manœuvre plus importantes à l’entreprise sur cette question primordiale pour entretenir le cercle vertueux de la performance partagée. A défaut nous dégageons toute responsabilité sur l’émergence d’une conflictualité dont nous percevons déjà les prémices, au mieux vous aurez à gérer un désintéressement des personnels désabusés tout aussi préjudiciable.
En conclusion, à la lumière de cette analyse, vous comprendrez que les administrateurs salariés ne peuvent cautionner cette approche par trop comptable. Ils voteront donc contre les comptes sociaux et consolidés 2013. Voyez y là Mmes Mrs les administrateurs, Mr le commissaire du gouvernement, non pas une remise en cause de la véracité de ces résultats mais simplement une appréciation particulièrement négative de la politique salariale imposée à l’entreprise. Une politique qui se dégrade en 2014 entérinant un modèle de contrat du type gagnant perdant pour les salariés qui présage d’une année difficile pour le climat social et la conflictualité.

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