07.10.2016 Alstom et l’avenir de la maintenance RATP
Si nous pouvons nous satisfaire pour nos collègues d’Alstom que le site de Belfort ne fermera pas, si on peut saluer la perspective d’un engagement d’Alstom dans la filière bus électrique, certaines annonces faites par le gouvernement mardi dernier ont en revanche de quoi nous interroger !
Parmi les mesures proposées, il est en effet question de faire du site de Belfort un « centre européen de maintenance ferroviaire ».
A ce stade, comment ne pas y voir un premier pas vers une modification profonde du travail d’Alstom en France, qui pourrait in fine se traduire par le transfert des activités de maintenance ferroviaire actuellement traitées par les deux grandes entreprises publiques SNCF et RATP.
Ces inquiétudes qui grandissent parmi les personnels de ces deux entreprises sont d’autant plus fondées que déjà en 2013, nous interpellions notre conseil d’administration sur une étude lancée par le STIF sur une hypothèse de confier la maintenance du matériel roulant des futures lignes 15, 16 et 17 du Grand Paris, non pas à l’exploitant de la ligne, mais au fournisseur de matériel roulant ;
L’ensemble des administrateurs salariés ont sur ce sujet adressé un courrier au président du STIF en septembre 2015 sur deux sollicitations dont celle-là pour rappeler que découpler l’exploitation et la maintenance et faire ainsi entrer un acteur supplémentaire dans la boucle ne peut à notre sens que déboucher sur de graves dysfonctionnements car lorsqu’un incident survient sur le réseau, le délai de réaction et de remise en service ne peut être optimisé que si exploitant et mainteneur appartiennent à la même structure. Ce qui est encore plus vrai dans le cas d’un mode automatique ou une étroite coopération entre ces deux métiers est un facteur déterminant de qualité de service. La même remarque vaut également à l’égard des impératifs de sécurité ferroviaire et de leur respect. Nous avions alors très clairement demandé au président du STIF que les futurs appels d’offre des nouvelles lignes du Grand Paris portent bien conjointement les fonctions d’exploitation et de maintenance.
Nous n’avons pas alors reçu de réponse et nous n’en avons toujours pas à ce jour.
Dans le même temps nous assistons également à un puissant lobbying des dirigeants successifs d’Alstom depuis plusieurs années présentant comme une anomalie dans le monde le modèle industriel ferroviaire Français avec la maintenance confiée aux opérateurs publics SNCF et la RATP, se proposant pour traiter cette maintenance qui pour eux serait une nouvelle niche de rentabilité financière dans un contexte de baisse de charge des commandes publiques ;
La maintenance du matériel ferroviaire donnée au constructeur serait de plus une remise en cause de notre modèle d’entreprise intégrée et participerait à son démantèlement et à remettre en cause notre force qui est la sécurité ferroviaire. N’a-t-on pas encore tiré les leçons de l’affaire Brétigny ?
Enfin, si l’avenir de la filière industrielle ferroviaire et particulièrement d’Alstom nous préoccupe également, il faut rappeler que la situation n’est pas nouvelle. Notre précédent PDG qui était également président de Fer de France avait informé l’ensemble de notre Conseil d’administration et donc les représentants de l’Etat sur la situation de la filière. Celle-ci souffre à la fois des politiques d’austérité qui ont réduit les moyens financiers dédiés aux collectivités et donc le volume des commandes publiques, et du choix politique de sacrifier le Ferroviaire au profit des camions et des fameux cars Macron, avec des effets catastrophiques en termes d’environnement, de services publics et d’aménagement du territoire.
Pour conclure, le site de Belfort d’Alstom, mais aussi le site d’Alstom de Valenciennes qui produit nos matériels roulants et que nous avons eu l’occasion de visiter récemment, et la filière industrielle ferroviaire dans son ensemble ont en réalité besoin de solutions pérennes. Et la même remarque vaut pour la filière industrielle du bus sur l’avenir de laquelle planent aujourd’hui les mêmes incertitudes à l’exemple du site d’IVECO à Annonay avec plus de 3000 emplois directs et induits.