27.11.2015 Budget 2016 de RATP Dev
Le budget qui nous est soumis nous montre une fois de plus le décalage qu’il y a entre les ambitions, à savoir privilégier la croissance du chiffre d’affaires, avec l’objectif d’atteindre en 2020 les 2 milliards de revenus et de réaliser 30 % du CA du groupe, et la réalité dans un secteur où les marges sont faibles et où la filiale continue d’avoir besoin d’apports de l’EPIC pour financer sa croissance.
Nous disions au moment de la présentation du PMT 2016-2020 que dans les pays matures, d’où sont censés provenir plus de 80% des revenus de la filiale à l’horizon 2020, les politiques d’austérité affectent toujours davantage les finances des collectivités et des Etats qui subventionnent le transport. Et que dans les pays émergents, la forte baisse de la croissance vient réduire les perspectives d’y faire des affaires rentables.
Beaucoup d’opérations et de marchés décidés dans la dernière période ont été présentés à ce Conseil comme autant d’Eldorados qui se révèlent à chaque fois problématiques, voire carrément négatifs : la Chine, dont nous cherchons maintenant à nous retirer ; le rachat des sociétés en France comme les Cars Dunois, dont les résultats affichent des pertes ; le sightseeing, où des difficultés de diverses natures apparaissent dans les trois villes concernées.
Les rendez-vous risquent d’être manqués avec des conséquences remarquables sur la profitabilité, le niveau de la dette et le recours à de nouvelles dotations en capital de la part de l’EPIC. Nous le répétons, cette croissance n’est pas soutenable. Cette stratégie a non seulement un coût exorbitant pour des résultats aléatoires et jusqu’ici globalement décevants. Mais elle conduit également à nous affaiblir en Ile-de-France, là où la RATP est pourtant la mieux positionnée, et cela alors que se profile un nouvel et considérable essor des réseaux de transport public dans notre région.
Nous voulons rappeler que nous n’avons jamais été contre la filiale de façon dogmatique. Nous pensons que la RATP a un rôle de première importance à jouer en France et à l’International dans le développement des transports collectifs. Notre désaccord porte sur la stratégie et les priorités du développement, et donc sur le modèle de gestion de RATP Dev.
Notre premier relais de croissance face à la concurrence se trouve paradoxalement en Ile de France. Le réseau de métro va doubler et celui de surface, avec le maillage des nouvelles gares du GPE, va être considérablement renforcé. Sans oublier que, si notre réseau sera soumis à appel d’offres en 2025, il en va de même pour celui d’Optile.
La RATP dans cette perspective doit se mettre en ordre de marche pour y prendre toute sa place face à la concurrence de grands groupes internationaux. Cette contribution au développement régional doit se faire via l’EPIC, avec des agents sous statut et non sous contrat privé. On ne peut pas accepter à ce sujet que ce soit RATP Dev qui réponde à l’appel d’offres de la ligne 15. L’EPIC doit être l’opérateur unique du groupe en Ile-de-France. Agissons auprès du STIF, qui n’a pris à ce jour aucune position indiquant qu’il imposerait une structure dédiée, pour lui démontrer toute la pertinence à maintenir l’EPIC dans la course.
Ensuite, nous proposons de repenser le développement hors Ile-de-France et à l’international sur d’autres bases et d’autres critères qu’aujourd’hui.
Au lieu de faire de la croissance du chiffre d’affaires l’objectif central de sa gestion et de multiplier les rachats d’opérateurs, nous proposons un autre modèle économique où la filiale définit un portefeuille d’activités permettant de dégager la marge nécessaire à la couverture de ses dépenses de fonctionnement. Cela permettrait d’arrêter les dotations de capital, RATP Dev s’autofinançant sans augmenter sa dette.
Dans ce cadre, la filiale devrait coopérer avec les opérateurs publics des grandes métropoles au lieu de tenter de les concurrencer. Nous proposons dans ce sens de réactiver le groupe que nous avions contribué à mettre sur pied il y a 20 ans.
Dans le même esprit, en France, nous proposons de réviser radicalement le positionnement du groupe, en recherchant la coopération avec les régies et les SPL. De ce point de vue, il faudrait renouer un partenariat avec AGIR qui regroupe une grande partie des réseaux indépendants.
Enfin, nous proposons de coopérer avec les deux autres opérateurs français qui sont maintenant à capitaux majoritairement publics : Kéolis, filiale à 70% de la SNCF, et Transdev, filiale à 60% de la Caisse des Dépôts. Cette coopération est immédiatement possible dans les opérations à l’international, où l’on ne peut se permettre comme cela a été le cas à) Londres et comme c’est encore le cas à Manchester d’avoir plusieurs porte-drapeaux qui se retrouvent en compétition.